Conservation de la biodiversité du Parc National du Diawling par la gestion durable et participative
Le Parc National du Diawling représente une surface de 16 000 hectares, avec une zone périphérique de 56 000 hectares. Possédant un statut de zone humide d’importance internationale, il accueille notamment 300 espèces d’oiseaux dont 130 sont des espèces migratoires et représente aussi l’unique zone de nidification du flamant nain en Afrique de l’Ouest.
Cette réserve a été créée en 1991 en tant que mesure compensatoire à la construction de plusieurs barrages sur le fleuve Sénégal, ces derniers ayant entrainé de grandes modifications du régime hydrique. Le déclin de ressources naturelles qui en a résulté a eu des effets dévastateurs sur l’économie locale. En effet, les principales activités menées dans cette zone sont la pêche, le commerce, l’élevage, la cueillette, l’artisanat, le maraîchage et le tourisme. On estime que 80% des revenus des populations locales en dépend. Aussi, l’accroissement démographique et l’augmentation des cheptels ainsi que le développement des plantes invasives au détriment des espèces à valeur économique et écologique constituent une pression grandissante sur les ressources naturelles.
Néanmoins, après 20 ans d’efforts de restauration, grâce à la construction d’ouvrages et de digues permettant de contrôler et alimenter en eau saumâtre les anciennes plaines inondables, le parc a su avec succès réhabiliter les écosystèmes et redevenir un site majeur en termes de biodiversité. Les actions de restauration écologique ont notamment permis de reconstituer les habitats de l’avifaune et le suivi écologique montre une fréquentation exponentielle des espèces aviaires.
Un nouveau plan d’aménagement 2013-2017, reposant sur la population locale, prévoit notamment l’extension du parc pour intégrer environ 6 000 hectares.
Le projet mené par le GRET, dont l’objectif principal est de renforcer l’action de conservation de la biodiversité du bas delta mauritanien par le Parc National de Diawling et de concrétiser son rôle de moteur d’un développement local durable, s’inscrit dans ce nouveau plan d’emménagement. Il répond notamment à 3 des 6 programmes d’action prévus, qui seront définis comme objectifs intermédiaires.
Ces objectifs intermédiaires sont :
- D’assurer la mission conservatoire du parc en procédant à une meilleure délimitation des zones protégées. Pour cela, certains espaces seront segmentés pour un meilleur usage et limiter les conflits alors que d’autres, situés en périphérie et présentant un intérêt en biodiversité, seront intégrés dans le parc. Ces espaces, ou Zones Naturelles de Protection, seront mis en place en accord avec les communautés locales, présentant ainsi un compromis entre activités humaines et intérêt faunistique. Ils seront gérés et surveillés. Enfin des actions de régularisation du typha (espèce invasive) et de restauration d’essences autochtones ayant une valeur économique seront mises en place.
- La promotion d’une gouvernance partagée du parc et d’une cogestion des ressources naturelles permettant une meilleure acceptation par les communautés locales et une meilleure gouvernance. Pour cela, les usagers prendront part aux décisions concernant la gestion du parc. Plus largement, il s’agit de mettre en place une gestion consensuelle des mises en eau des plaines d’inondation satisfaisant à la fois les besoins économiques et écologiques.
- Le développement de la valorisation économique des ressources locales. Réaffirmé dans le nouveau plan d’aménagement, ce développement sera appuyé par la vulgarisation des techniques d’exploitation durables, de transformation et de conditionnement de ces ressources ainsi que leur commercialisation. Ces ressources naturelles incluent le typha qui permet de produire du charbon, du compost ou du fourrage et les produits forestiers non ligneux comme les nénuphars (permettant de produire du couscous), les acacias (pour les gommes et gousses) ou le sporobulus.
Enfin le rôle des femmes sera mis en avant dans ce projet. En effet, une majorité d’entre elles exerce une activité artisanale mais n’a, pour le moment, que peu d’influence sur les prises de décisions.
Résumé du rapport final (Décembre 2020):
Le projet a été mis en œuvre dans un contexte national instable mais ses résultats sont globalement positifs et ont été réalisés aux trois quarts. Il a permis de déclencher une dynamique de développement communautaire dans une zone pauvre depuis toujours quasiment exclue de toute intervention publique. Ses principales avancées portent sur la restauration et la conservation des habitats, des espèces et de l’ensemble de la biodiversité du PND et de ses zones périphériques. Un zonage écologique a été mis en place : les nouvelles limites étendues du Parc et des 6 Zones Naturelles Protégées ont été validées par le Conseil d’Administration du PND. Une Union de Gestion des Ressources Naturelles, regroupant 50 personnes de 25 villages, a été mise en place pour la construction d’une gouvernance partagée. Un suivi écologique de la biodiversité est désormais assuré mensuellement via la création d’un observatoire. L’influence négative des espèces envahissantes, notamment du typha, a été réduite grâce à la coupe de ces espèces sur plus 260 ha où s’observe déjà une reconquête de la biodiversité. Des espèces à valeur écologique et économique, comme le Sporobulus, ont été restaurées sur 28 ha et 20 femmes, issues de 4 coopératives, ont été formées à leur utilisation. Enfin, des actions d’éducation à l’environnement ont été menées dans 7 écoles primaires des villages périphériques du parc.
Pour ce qui est de la promotion de la cogestion et des pratiques d’exploitation durables des ressources naturelles, un système a été mis en place avec la création de 4 Unions de Métiers : pêche, élevage, artisanat et maraichage ainsi que d’un fonds de microfinance destiné aux coopératives les plus dynamiques. Une Zone Naturelle co-gérée pilote a été identifiée de façon participative et un Plan de Gestion local a été développé. La mise en place formelle des instances de gouvernance s’est poursuivie. Le processus, encore inédit en Mauritanie, de gouvernance partagée a engagé des changements durables, permettant aux populations riveraines du parc de devenir actrices de leur territoire, mais le processus légal de reconnaissance formelle n’a pas pu encore aboutir sur la durée du projet.
Enfin, pour ce qui est de la valorisation des ressources naturelles, la plus prometteuse concerne le nénuphar : une filière locale de commercialisation a été soutenue avec 9 coopératives de 77 artisanes et la semoule de graines de nénuphar est désormais commercialisée à Nouakchott. Une filière de production de nattes ornementales à partir du Sporobolus a aussi été développée. Des essais techniques visant à valoriser le Typha, en particulier en charbon, ont aussi été menés mais n’ont pas été concluants, notamment face à la concurrence du charbon de bois.