Encourager une coexistence pacifique et mutuellement bénéfique entre les éléphants et les hommes
D’après de récentes études, la population d’éléphants d’Asie a chuté d’au moins 50 % au cours des trois dernières générations. Menacée par l’exploitation forestière illégale, le trafic d’espèces sauvages, le défrichement, les feux de forêt, ainsi que les conflits avec les humains, la population sauvage de ces éléphants est aujourd’hui estimée à moins de 40 000 individus.
La chaîne de montagnes Tenasserim, qui marque la frontière entre la Thaïlande et le Myanmar, abrite l’une des plus grandes populations d’éléphants d’Asie de tout le Sud-Est asiatique. On y trouve le parc national de Kui Buri, qui recense environ 320 éléphants. Non clôturée, la frontière orientale du parc est bordée de plantations d’ananas qui attirent les éléphants, créant un point chaud de conflits entre éléphants et humains.
Près de 80 % des agriculteurs de cette zone cultivent l’ananas en guise de monoculture de rente. Tous sont fortement tributaires des engrais et désherbants chimiques. Le village de Ruam Thai connaît un niveau particulièrement élevé de conflits entre éléphants et humains. En réponse aux mesures de dissuasion active mises en place pour éloigner les éléphants des cultures, les agriculteurs déplorent une augmentation du nombre d’agressions par ces animaux. Parmi les stratégies actuellement employées pour repousser les éléphants figurent l’utilisation de feux d’artifice, l’édification de clôtures électriques ainsi que le gardiennage de nuit, mais l’efficacité de ces mesures est limitée. En outre, depuis la crise mondiale de la COVID-19, les communautés locales ont perdu les revenus qu’elles tiraient jusqu’à présent de l’écotourisme axé sur les éléphants.
En 2020, l’association Bring The Elephant Home a mis en place les premières parcelles expérimentales « Tom Yum » dans le village de Ruam Thai. Ce projet accompagne les agriculteurs locaux vers la culture de variétés dont les éléphants ne se nourrissent pas (principalement les ingrédients de la soupe traditionnelle thaïlandaise, le Tom Yum) au lieu de l’ananas, dont ils sont particulièrement friands. En l’espace de deux mois, les éléphants ont détruit 96,5 % des plants d’ananas mais n’ont ravagé que 5,2 % des plantations de piment, 4,8 % des plantations de citron vert kaffir et 2,5 % des plants de citronnelle (et ce, principalement par piétinement involontaire car ces cultures étaient plantées à proximité des ananas). Une autre variété de citronnelle, ainsi que les plants de combava et de karonda n’ont quant à eux subi aucun dommage de la part des éléphants.
Le projet a pour principal objectif d’encourager l’adoption de nouvelles méthodes d’agriculture biologique, d’accroître la biodiversité locale, de réduire l’utilisation de produits chimiques, de générer des revenus durables pour les agriculteurs et de contribuer au reboisement.
Par le biais d’ateliers communautaires, le projet vise à aider les agriculteurs à délaisser la monoculture d’ananas au profit d’une culture régénératrice diversifiée, à base de variétés peu prisées des éléphants. Ces nouvelles variétés peuvent être transformées en de nombreux produits (soupe, huile de massage, savon, bougies…) commercialisés grâce aux bénéfices qu’ils apportent à la conservation. Une partie des bénéfices tirés de la vente ces produits sera ainsi utilisée pour restaurer l’habitat des éléphants. Enfin, les résultats du projet feront l’objet d’un suivi scientifique au moyen de questionnaires, d’entretiens, de pièges photographiques et d’observations directes.
Elephants du Parc National Kuiburi en route vers les terres agricoles
Atelier communautaire portant sur les cultures que les éléphants n'aiment pas et la conception de parcelles expérimentales
Photo de groupe après le premier évènement de plantation
Citronnelle dans la pépinière de Tom Yum
Empreintes d'éléphants dans la parcelle expérimentale de Karonda. La citronelle, le citron vert et le Karonda n'ont pas subi de dommage des éléphants.
Savon à base de citronnelle, en faveur des éléphants