Agriculture Durable
Myanmar

La transition agroécologique par les paysans sans-terre du Delta de l’Ayeyarwaddy


Contexte :

Le Delta de l’Ayeyarwaddy (ou Irrawaddy), au Myanmar, est marqué par la monoculture du riz et par une forte inégalité d’accès au foncier. Selon différentes études socio-économiques, seul un tiers des ménages possède des rizières alors que les deux-tiers restants vendent leur force de travail aux riziculteurs et cultivent de minuscules parcelles maraîchères avec quelques animaux d’élevage. Ces derniers sont d’autant plus affectés par la mécanisation croissante des exploitations rizicoles qui réduit leurs opportunités d’emplois et les contraint à l’exode vers Yangon et à l’étranger. Ces populations se reportent alors sur la pratique de la pêche dans les rivières du Delta, réduisant les stocks de poissons déjà pollués par les produits chimiques utilisés en riziculture.

Néanmoins, certains habitants sont parvenus à développer des activités durables (aquaculture, maraîchage diversifié orienté vers la consommation locale ou maraîchage de contre-saison pendant la mousson), leur apportant une certaine autonomie alimentaire et économique. Ils font néanmoins face à l’absence de soutien par les pouvoirs publics qui appuient exclusivement la riziculture dans la région.

Objectif :

Le but de ce projet est de créer les conditions pour que les systèmes de production des paysans sans-terre du Delta de l’Ayeyarwaddy soient plus durables et résilients.

Activités :

Tout d’abord, les systèmes de productions maraîchères et aquacoles seront diversifiés et renforcés notamment via différentes innovations agroécologiques (compostage, lutte biologique contre les ravageurs, maraîchage sur table, maraîchage sous serre, variétés de légumes nutritives et adaptées à la mousson, systèmes aquacoles à petite échelle, production d’alevins, association aquaculture-maraîchage, production de semences). Ces innovations sont issues de 10 années de recherche menée par les équipes de GRET dans la région. Elles seront testées toute l’année et comparées aux pratiques classiques. Elles seront complétées par des outils de gestion simples gérés par les paysans.

Des échanges de pratiques entre paysans se tiendront ainsi que des formations par des pairs. Un service de conseil porté conjointement par les paysans et les techniciens sera mis en place. Les capacités techniques et organisationnelles de ces derniers seront renforcées. Des outils de communication, d’information et d’éducation pour promouvoir l’innovation en matière d’agroécologie seront développés à partir des résultats obtenus par les groupes de paysans.

En parallèle, les ménages ruraux seront sensibilisés à l’intérêt d’une alimentation diversifiée et riche en produits locaux issus de l’agroécologie. La promotion de ces produits sera également faite sur le marché de Bogale.

Résumé du rapport final (mars 2022) :

Malgré les complications sur le terrain, du fait de la COVID-19 et du coup d’état militaire le 1er février 2021, l’équipe a réussi à mettre en œuvre les activités dans 14 villages, réalisant un gros travail d’adaptation pour parvenir à soutenir les paysans avec des alternatives à distance (renforcement des responsables des champs-écoles paysans, soutien technique en ligne). Un diagnostique participatif des systèmes de production des paysans sans ou avec peu de terres a été réalisé, atteignant 762 personnes en tout (y compris 55% de femmes). 14 champs-écoles paysans (CEP) ont été créés afin de soutenir ces paysans : 236 personnes (51% de femmes), membres des CEP, ont été formées à des techniques agroécologiques telles que la fabrication d’engrais et de pesticides bio. 14 membres des CEP ont construit des équipements agroécologiques innovants tels que des serres et des jardins sur table. Cette expérience a été très positive, générant une nouvelle source de revenus de la culture de légumes, et plusieurs paysans les ont répliquées, sans même le soutien du projet. 144 paysans ont aussi participé à de l’aquaculture intégrée (135 digues et 9 associations poisson-rizières).

14 animateurs CEP ont été formés et ont assuré le suivi de la production, enregistrant les revenus générés dans les parcelles. L’équipe s’est fortement appuyée sur les dirigeants des CEP tout au long de la période COVID du fait d’un accès limité aux villages. Ces derniers ont suivi les membres des groupes CEP au niveau du village et ont continué à interagir avec l’équipe (collecte de données, partage de conseils techniques, distribution d’intrants, etc.), ce qui a été reconnu dans l’évaluation finale comme un renforcement alternatif des capacités des leaders CEP (au lieu de la formation de formateurs initialement prévue). Ils ont réalisé 30 sessions de formation, qui étaient plutôt des formations en porte-à-porte dispensées aux membres CEP et aux paysans bénéficiaires de kits de semences. 5 vidéos ont également été réalisées et partagées entre les agriculteurs et 1 page Facebook a permis aux agriculteurs d’échanger sur leurs expériences et de discuter avec un agronome.

Pour soutenir la diversité de l’alimentation et augmenter la demande de légumes issus de l’agriculture agroécologique, le projet a également organisé des formations en nutrition, auxquelles ont participé 623 personnes, et soutenu 21 producteurs de légumes bio qui ont augmenté leurs jours de vente à Bogale de 3 jours par mois au début du projet, à 12 jours à la fin. 306 ménages ont également bénéficié de kits de semences potagères, distribués dans 14 villages. L’évaluation finale a souligné que « le projet a un rendement très élevé en matière d’agriculture durable, en ne déployant que des itinéraires techniques agroécologiques et en fournissant des résultats exceptionnels en termes de qualité des cultures, de diversification, d’innovation et de rendement économique pour les agriculteurs, tout en supprimant progressivement les intrants chimiques ».

Les pratiques agroécologiques développées par les agriculteurs du Delta ont fortement contribué à leur autonomie alimentaire (en améliorant les capacités de production locales et en réduisant la dépendance aux aliments importés) et à leur diversification. Cela a également contribué à réduire leur dépendance aux intrants externes (grâce à la capacité de produire localement des intrants biologiques). Compte tenu du contexte actuel du Myanmar avec des marchés et des chaînes d’approvisionnement perturbées, ces pratiques ont le potentiel d’être largement diffusées et adoptées par les agriculteurs pour faire face aux défis actuels, permettant un impact durable.

 

Vidéo présentant un bénéficiaire du projet (en anglais) :

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