Une meilleure information agroclimatique pour les femmes et les agriculteurs pauvres appartenant à des minorités ethniques
La province de Ratanak Kiri est l’une des provinces les moins développées du Cambodge : le taux d’alphabétisation y est largement inférieur à la moyenne nationale. Les habitants souffrent de malnutrition sévère, et les indicateurs de santé sont les plus mauvais du pays (plus de la moitié des enfants de moins de cinq ans souffrent d’un retard de croissance).
L’agriculture fournit la majeure partie des emplois ; les agriculteurs de subsistance sont de plus en plus exposés aux aléas et disposent d’une faible capacité d’adaptation aux catastrophes climatiques à l’origine de pertes de récoltes et de l’aggravation de l’insécurité alimentaire. Alors que le temps est de plus en plus imprévisible, il est essentiel pour les agriculteurs de pouvoir accéder et réagir aux informations météo saisonnières, et obtenir à temps des conseils d’agriculture fiables pour optimiser leur production. Même si le service officiel de la météo du Cambodge émet des prévisions, ces dernières parviennent rarement aux populations éloignées et ne sont pas utiles pour les agriculteurs car elles couvrent des zones très vastes et ne sont pas accompagnées de conseils concernant les conséquences sur l’agriculture. De plus, ces informations sont rarement fiables, diffusées en temps voulu ou compréhensibles. Il existe également des difficultés concernant l’attitude des fonctionnaires et des services vis-à-vis des femmes pauvres et des agriculteurs pauvres appartenant à des minorités ethniques, et de leurs besoins spécifiques.
L’objectif de ce projet consiste à augmenter la résilience des femmes et des agriculteurs appartenant à des minorités ethniques au changement climatique et à développer la sécurité alimentaire grâce à une production agricole durable dans la province de Ratanak Kiri.
Ce projet permettra d’assurer aux femmes et aux agriculteurs issus de minorités ethniques un accès en temps voulu à des prévisions météo saisonnières fiables ainsi qu’à des conseils en agriculture, et de leur donner la capacité d’agir en conséquence pour réduire les pertes de récoltes et développer la sécurité alimentaire grâce à une production agricole durable. Le projet permettra de développer la résistance des petits agriculteurs marginalisés de la province. La méthodologie utilisée consiste à soutenir des réseaux d’apprentissage d’agriculteurs au niveau des villages et de développer les compétences des fournisseurs de services météorologiques et de conseils agricoles.
Pour atteindre ces différents objectifs, le projet consiste à:
- Mettre en place des réseaux d’apprentissage d’agriculteurs : 75 % des bénéficiaires directs seront organisés pour l’engagement de la communauté et le transfert de connaissances au niveau des villages. Ces réseaux donneront aux agriculteurs accès au savoir et aux techniques durables et intelligentes, par exemple pour la récolte, la gestion de nutriments adaptés, la gestion des résidus, le labourage minimum, de nouveaux types de culture et l’introduction d’engrais biologiques. Ces réseaux bénéficieront de l’appui des antennes agricoles locales et favoriseront la mise en place d’activités agricoles durables et la prévention des catastrophes naturelles dans les villages. Cela permettra de réduire les pertes, et d’augmenter la production agricole et la sécurité alimentaire des familles. De plus, ce dispositif associera les femmes, en les coachant et les encourageant à assumer des positions de direction et des postes clefs dans les réseaux.
- Développer l’information agroclimatique et le conseil en agriculture pour les agriculteurs. Des kits peu coûteux de surveillance météo et des pluviomètres seront installés dans les villages. Les agriculteurs seront formés à la mesure et à la transmission des informations météo. Les informations collectées permettront d’améliorer les prévisions et permettront d’obtenir une meilleure connaissance de l’humidité du sol. L’équipe projet s’assurera que les connaissances locales seront utilisées par les services officiels de météo pour améliorer l’information agroclimatique et répondre aux besoins des agriculteurs. L’équipe projet travaillera avec le ministère des Ressources en eau et de la Météorologie, et le ministère provincial, pour produire des prévisions météo saisonnières qui seront affinées au niveau des zones agroclimatiques locales. L’approche des scénarios de planification participative sera introduite en tant que méthodologie permettant aux communautés d’explorer les futurs changements potentiels et les impacts associés, et développer des plans d’action locaux adaptés.
- Renforcer la capacité des autorités locales et l’apprentissage. Des facilitateurs locaux recevront une formation sur des sujets techniques, la médiation et l’engagement communautaire, y compris sur le genre, pour garantir l’opérationnalité des réseaux d’apprentissage d’agriculteurs. Les méthodes de formation seront participatives, actives et centrées sur l’apprentissage social expérimental. Les fonctionnaires seront en mesure de comprendre les besoins spécifiques des femmes, des hommes et des minorités ethniques, et d’y apporter des réponses. Ce dispositif devrait d’améliorer les attitudes envers les femmes et les agriculteurs appartenant à des minorités ethniques. Il s’agit d’un projet d’apprentissage et il est donc important de documenter les méthodes utilisées et les effets constatés, et de partager les conclusions dans la perspective d’étendre ce modèle à d’autres provinces du Cambodge.
La finalité du projet consiste à donner accès aux informations agroclimatiques fondées sur les prévisions météo saisonnières et à des recommandations agricoles à 2 172 agriculteurs. 80 % d’entre eux auront la possibilité d’obtenir une production plus stable et de limiter les pertes dues aux événements climatiques. Enfin, les femmes auront une influence accrue sur les décisions d’agriculture grâce à leur implication dans la communauté et à un meilleur accès à l’information.
Résumé du rapport final :
2 172 agriculteurs se sont structurés en réseaux d’apprentissage (Farmer Learning Networks – FLN), et sont représentés par 2 d’entre eux dans chaque village (une femme, un homme) qui se réunissent mensuellement au niveau des communes. 80% des membres des FLN reçoivent des informations sur les prévisions ainsi que des conseils correspondants de la part de leurs représentants. Ils ont également modifié leurs pratiques de gestion agricole.
27 formations de formateurs portant sur les techniques de facilitation et les pesticides botaniques ont été organisées avec 41 participants dont 21 femmes. De même, 6 ateliers de planification de scénarios participatifs ont été organisés sur la culture du manioc et du soja. Plusieurs techniques de production agroécologiques ont également été introduites (comme l’élevage écologique de poulets, le système d’intensification du riz, la culture du manioc et du soja, l’amélioration des sols et les pesticides botaniques). Cela a conduit à une augmentation de 51% du rendement en riz, 39% pour le manioc et 13% pour le soja par rapport au début du projet.
Afin que les agriculteurs aient accès aux informations agro-climatiques, basées sur des prévisions météorologiques saisonnières pertinentes à l’échelle locale, et des conseils agricoles, 15 pluviomètres et 3 stations météorologiques automatiques ont été installés. 6 prévisions saisonnières locales ont été réalisées.
7 sessions de formation sur l’analyse de genre et la prise de décision familiale sur l’achat d’intrants agricoles ont été menées pour accroître l’influence des femmes dans les décisions agricoles. 73% des femmes ont également reçu de la part des FLN des formations sur la météo et l’agriculture. 61% d’entre elles ont déclaré prendre des décisions agricoles conjointes à la fin du projet.
Il y a également eu une prise de conscience accrue auprès des ministères concernés aux niveaux national et provincial sur l’importance des informations agro-climatiques pour améliorer la production agricole. Des échanges d’expériences ont été organisés avec d’autres communes (sites hors projet).
Découvrez le témoignage de Vicheka, agricultrice participant au projet :